Mohamed BIDI 

 

 

Poète et philosophe, Mohamed BIDI  vit à Casablanca. au Maroc.

 

 

 

 

Le passager rêveur

 

 

Je retiens tout

          en ne retenant rien

Peut-on retenir le vent

      quand il souffle fougueux

                            et nous emporte

Peut-on retenir l’eau

                                 dans sa main

       qui nous coule entre les doigts

Peut-on retenir le nuage doré

quand il passe au dessus de nos têtes

Peut-on retenir l’instant fugitif de l’amour

et l’instant où les étoiles scintillent

          comme des diamants

    qui brillent dans le ciel noir

Peut-on retenir l’aube

     quand elle court rejoindre

        le crépuscule

Mais que retient-on de la vie

                                             Rien

      si ce n’est nos rêves fragiles

                       et éphémères.

 

 

 

La nuit du poète

 

Le poète vit parmi la populace

                           comme un étranger

On le confond avec les badauds

On le prend souvent pour un bouffon

                           ou pour un voyou

Mais quand il meurt

       il devient la conscience du peuple

On s’aperçoit qu’il vivait simplement

       peut-être même dans la misère

                            plus que les autres

Mais il disait vrai

       parce qu’il avait tout su

Il avait tout enduré

       parce qu’il entrait dans la peau

                                 de chacun

       sans se faire remarquer

Il était envoyé du ciel

                                 à son pays

       qui ne sait fêter

                               que les morts.

 

 

 

 

Le pouvoir de l’argent

 

 

Quand on a de l’argent

          on voit très bien

      ce qu’on doit acheter

  et l’on sait où aller

       C’est l’argent qui crée le besoin

Mais quand on a rien

  On ne pense même pas à l’argent

  On n’a aucune ressource

       On ne s’inquiète que du pain

Et l’on est prêt

             à faire n’importe quoi

        à se vendre

               ou à vendre son cul

pourvu qu’on change de statut

                              et de condition

Si tu affames ton chien

                      il te suivra

        mais si tu persistes

   il aura la rage

et deviendra aveugle.

 

 

 

 

Je pense donc je suis

 

 

Et puisque je dois mourir

C’est comme si j’étais déjà mort

Que vais-je laisser derrière moi

Que vais-je emporter avec moi

      C’est le crâne qui est tout

Il contient le monde entier

       et toute l’histoire du monde

C’est par lui que vient le désir

       S’il y a âme

elle ne doit pas en être loin

Mais le crâne

               demain il sera vidé

                                        par la vermine

et il continuera à ricaner tout seul

                                    sous terre.

 

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