Là
Yves
Boudier
Collection Biennale
Internationale de Poètes en Valde-Marne
Edition Farrago
66 p 12 € ( Note parue dans le N°175 d’Action Poétique)
Quelque chose, que je ne sais nommer, me traverse à la lecture de ces
poèmes d’Yves Boudier. Poèmes dont la forme sur la page m’interpelle. Ce
n’est pas seulement qu’elle m’intrigue, mais elle m’accroche à sa présence.
Peut-être par la sobriété des poèmes, comme des stèles posées, sur le
calendrier de jours vécus ?
Ce
sont quatre ensembles de poèmes, titrés aux noms de mois de l’année –
Janvier, Février, Mars et Septembre -, qui composent ce livre. Episodes
funestes que l’on soupçonne sous le dépouillement du langage, la brièveté de
la forme.
En
aval du siècle
trois
semaines
de
l’autre
côté
puis
rien
Les poèmes sont courts. Les vers ténus, dans une mise en page aérée. Ce qui
caractérise plus particulièrement l’écriture d’Yves Boudier, avec sa brièveté,
ce sont les distinctions typographiques utilisés pour différencier les sources
du langage. Deux voix, cohabitent ainsi dans les poèmes tout au long du
livre. Quelle est cette écriture différenciée – cette voix – qui demeure dans la
distance typographique de l’italique et de la parenthèse ? Quel est ce contrechant,
qui accompagne et rythme la parole, comme scindée dès lors, du
poète ? Mais voix aussi qui résonne en harmoniques dans son lieu intime et
qui
fait du poème, ce juste écho du ressenti.
Qui chante là quand toute voix se tait ? Ce vers de Philippe Jaccottet
interroge au coeur l’émergence de toute parole poétique.
Là, dans ce lieu du poème ? Où la parole de l’Être est scindée. Deux voix.
L’une se distinguant de l’autre. Distante. En retrait. Un contrepoint se
démarquant plus encore sur la page, par un cadrage à droite, semblant dans
cette volonté, inscrire plus profondément des frontières ineffables de l’Être.
Qui réside dans le lieu de cette opposition ? Quelle douleur, quelle peine
trouble ainsi le souffle du poète, jusqu’à la rupture de certains poèmes sur la
page, dans cette traversée verticale d’un vide, entre deux écritures se faisant
face ?
Quelque chose se passe - Là - que je ne sais nommer. Mais qui m’atteint par
le poème sur la page. Et qui me touche.
hm
hm